- Mois-Sonneur
- Mis en ligne le
Mois-Sonneur #107 : L'Unreal Engine 5, ça change quoi ?
Retour sur l'actualité du monde du jeu vidéo et un peu plus pour le mois d'Avril 2023 avec ce Mois-Sonneur numéro 107. Pas mal de petites choses un peu partout mais pas vraiment de gros sujet chaud pour la question du mois donc on se rabat sur une discussion technique sur le moteur Unreal Engine 5. Mais peut-être que c'est plus chaud qu'il n'y parait. Comme toujours, n'hésitez pas à vous exprimer en commentaire et à partager autour de vous.
C’est beau ! Mais est-ce que c’est bien ?
Voilà quelques mois que le moteur Unreal Engine 5 est dans la nature et que des gens de toute part s’en emparent pour faire toute sortes de choses à vous décrocher la mâchoire, et nous n’avions toujours pas pris le temps d’un Mois-Sonneur pour faire un point un peu général sur le sujet. Nous allons donc y remédier aujourd’hui.
Avant toutes choses, refaisons les présentations. L’Unreal Engine 5 est la cinquième version du moteur de jeu Unreal Engine, développé par Epic Games qui est aussi connu pour les jeux Gears of War, Unreal Tournament ou Fortnite (et Paragon, n’oublions pas Paragon). Un moteur de jeu, c’est un logiciel qui contient de nombreux outils déjà programmés, revenant sur des tâches communes à de nombreux jeux, permettant de faciliter le développement de jeux vidéo. Cela comprend le rendu graphique mais aussi la construction de niveaux, la gestion des différentes animations, la gestion des éléments physiques en tout genre, l’affichage des menus on encore l’exécution des différents scripts qui permettent de créer le gameplay.
Dans ce monde des moteurs de jeu, il existe des technologies propriétaires comme le Frostbite, le Decima ou le Snowdrop pour ne citer que quelques noms. Ces logiciels sont développés à l’intérieur des gros éditeurs et sont souvent très spécialisés, attachés au départ à un jeu ou au mieux à un type de jeu. Et en face, on trouve des moteurs généralistes, ouverts à tous, comme le CryEngine, Unity ou encore l’Unreal Engine. Ces moteurs sont moins spécialisés et sûrement moins optimisés par défaut mais couvrent beaucoup plus de genres, allant du cartoonesque au réalisme, du FPS au jeu de voiture ou à la plateforme en 2D.
Maintenant que nous y voyons plus clair sur cette idée technique, pourquoi le cinquième numéro de l’Unreal Engine fait-il l’actualité au point où son nom devient presque un argument commercial ? Principalement parce qu’il met à disposition de n’importe qui des outils du meilleur niveau, de façon gratuite et avec beaucoup de facilités. Et c’est toute cette combinaison qui en fait un outil propre à bouleverser le développement de jeu vidéo, à tous les niveaux.
Pour mieux comprendre, rentrons un peu dans le détail de ces points techniques si incroyables. Les éléments les plus mis en avant sont avant tout graphiques, comme l’intégration du ray-tracing et toutes les technologies de précision sur la lumière avec le système Lumen. Avec ceci, il vous suffit d’appuyer sur un bouton, d’accepter la fonctionnalité, et vous avez un rendu réaliste des lumières, qui vous aurez précédemment pris plusieurs semaines de travail ainsi que l’emploi de développeurs spécialisés dans ces phénomènes physiques, qu’on ne trouve pas à tous les coins de rue.
On trouve ensuite un ensemble d’outils liés aux textures graphiques, avec le système Niagara ainsi qu’une banque d’images de niveau cinéma. Ici, l’objectif est de mettre à disposition des textures graphiques du meilleur niveau professionnel mais aussi des outils techniques permettant de les afficher en direct dans des jeux, et pourquoi pas de les modifier la volée pour des voitures cabossées ou des bâtiments détruits par explosion. Pour cela, il faut aussi des modèles physiques qui peuvent évoluer plus facilement, ce qui est aussi intégré à l’Unreal Engine 5 qui offre même une gestion de particules très pointue, pouvant permettre de simuler une flaque d’eau goutte par goutte, même sur console.
Enfin, vous aurez certainement besoin de personnages humanoïdes pour peupler votre jeu et là aussi, l’Unreal Engine 5 à ce qu’il faut avec son système MetaHumans. Cela implique la création graphique des personnages, là encore avec un rendu incroyable notamment pour la peau, mais aussi leur animation pour les rendre vivants. Vous pouvez faire tout ceci sans quitter l’Unreal Engine 5, là encore en quelques clics et à partir d’images prises avec un smartphone donc accessible à presque n’importe qui. Et encore une fois pour des résultats rivalisant avec les tous meilleurs techniciens du marché.
En plus de toutes ces techniques de pointe, l’autre élément important que j’ai déjà pas mal ressassé est la mise à disposition du plus grand nombre, allant du simple amateur tout seul chez lui aux studios de plusieurs milliers de personnes qui brassent des millions d’euros ou de dollars. Cela se fait d’abord par la gratuité de l’outil, qui n’impose un paiement que lors d’une exploitation commerciale. Les amateurs peuvent donc l’utiliser sans coût additionnel et les grosses entreprises peuvent faire des prototypes avant de lancer de plus gros travaux. Et comme c’est à la base un moteur généraliste, vous pouvez l’utiliser sur un jeu de plateforme en 2D cartoonesque ou sur un jeu de course de voiture ultra-réaliste, donc tous les développeurs sont potentiellement concernés.
Mais mettre à disposition gratuitement un logiciel n’est pas suffisant pour le rendre réellement et techniquement accessible au plus grand nombre donc Epic Games accompagne toute son œuvre de nombreux tutoriels ainsi que de banques d’assets en tout genre, là encore disponible gratuitement. Et puisque le langage de programmation utilisé est le C++, un langage commun, pas besoin de réapprendre à programmer pour les personnes ayant déjà ces connaissances, quand les autres peuvent prendre des cours généralistes. Et pour être encore plus inclusif, la plupart des outils sont utilisables avec quelques boutons et autres valeurs à paramétrer, permettant à tout un chacun d’essayer des choses sans même avoir de connaissances en programmation informatique.
Tous ces éléments ont donc mené à une très rapide et très large adoption de ce moteur, bien aidé par le déjà populaire Unreal Engine 4. Des projets de toute part sont lancé comme Unrecord qui a fait beaucoup de bruits ces derniers temps, mais aussi Hellblade 2 chez Ninja Theory pour des choses à gros budget, le futur retour de Tomb Raider que nous n’avons pas encore vu, Arc Raiders par un nouveau studio fait d’anciens ou encore le tout récent Star Wars Jedi Survivor. Et la liste est encore bien plus longue si on compte tous les projets maison qui ne sont parfois que sur la simulation de la mer, des systèmes de poils sur marionnette ou des recréation d’environnements réels. Vous pouvez même trouver quelques démos de remake de jeux connus sous cette technologie qui font toujours leur effet.
Le moteur est donc bien implanté et ce processus va se poursuivre parce qu’il propose aussi des assistances améliorant le flux de travail en équipe, comme la possibilité de travailler à plusieurs en direct sur le même environnement ouvert de plusieurs kilomètres carrés. Que ce soit pour du GTA-like moderne et urbain ou pour de la plateforme en deux dimensions avec des personnages en tissu, pour de la course de voitures dans de grands espaces ou pour des puzzles dans un monde dessiné au crayon, l’Unreal Engine est fait pour vous.
De nouveaux studios qui viennent de se créer annoncent d’ailleurs utiliser le moteur d’Epic Games avant même de nous dire quelle est l’idée de leur premier projet et cela se comprend. La plupart des développeurs vont acquérir une expérience avec ces outils qui couvrent très largement le champ du développement de jeu, il serait dommage de se priver de cet avantage, surtout pour des petites structures qui n’ont pas les moyens de maintenir leur propre technologie.
On peut d’ailleurs se demander si cela a encore un sens d’avoir des concurrents et la réponse est tout de suite oui. Il y a d’abord les technologies propriétaires où des gros studios développent leur moteur, leurs outils, pour être optimisé sur un type de rendu. Cela permet de garder la main d’un bout à l’autre et de ne pas être tributaire d’une entreprise tiers, raison pour laquelle EA maintient son Frostbite ou Ubisoft son Snowdrop. Ces outils peuvent être plus précis sur certains points et donc amener des nouveautés techniques dans le paysage, on pensera notamment au Decima de Guerrilla Games, qui passe régulièrement dans les mains de Kojima Production, et qui fournit des effets météorologiques assez impressionnants.
Les concurrents plus directs de l’Unreal Engine 5 sont aussi toujours de la partie. Ce sont les moteurs généralistes et disponibles largement comme Unity, le CryEngine, le Source Engine ou encore les plus petits mais très sympas Godot ou Haxe (et de plus en plus utilisés pour de beaux projets acclamés). Ces autres moteurs doivent survivre avec leurs propres arguments, bien souvent leur légèreté d’exécution, surtout pour des petits projets ; pas besoin de sortir la tronçonneuse s’il faut couper une allumette. Mais soyons honnête, la tronçonneuse huilée et proposant des néons donne vraiment envie de s’en servir.
Vous comprenez maintenant un peu mieux pour l’Unreal Engine 5 est devenu un acteur majeur du marché du jeu vidéo, au point où un élément technique se retrouve sous les projecteurs. Oui, c’est un gros changement et il est certain que nous n’en voyons que le début. Et encore une fois, seul l’avenir sera capable de nous prouver si c’est un point d’inflexion duquel on ne revient pas, ce qui est tout à fait possible dans ce cas là.
Commentaires
- Aucun commentaire sur cet article.
Ajouter votre commentaire
Écrire un commentaire en tant qu'invité